Victimisation de la société
Dans la conception traditionnelle de la responsabilité telle que le juge l'a progressivement dégagée, l'accent est plus mis sur la responsabilité que sur le préjudice. En d'autres termes, l'élaboration d'une responsabilité ne se justifie pas seulement et, peut-être pas d'abord, par le souci d'indemniser les victimes. Le système de responsabilité est plus moralisateur qu'indemnitaire. Il fallait certes réparer, il fallait surtout sanctionner les conséquences d'un comportement ou d'un acte. Sans omettre que la sanction avait– l'a-t-elle encore de nos jours?- une vertu « éducative » et « dissuasive...
La préoccupation de moralisation, de sanction, n'a évidemment pas disparu, mais elle a tendance à céder la première place à la réparation. Ce qui importe aujourd'hui aux victimes, c'est certes la sanction de l'auteur mais aussi, la réparation des dommages qu'elles subissent.[1]
Tendance d'autant plus accrue que notre société donne un prix à toute chose et que l' «étalon» dominant est au service du Veau d'or. Le mot «valeur», avec toutes ses ambiguïtés , a supplanté celui de «principe»...
3.1 ) Vocabulaire:
On parle de dommage, mais aussi de préjudice. S'agit-il de la même notion ? Plusieurs positions se sont affirmées sur ce sujet. Pour les uns, il n'existe aucune différence entre le dommage et le préjudice, ces deux termes pouvant être utilisés indifféremment[2].
D'assez nombreux auteurs font une différence entre ces deux termes. Le premier auteur à avoir donné une véritable portée à la distinction entre le dommage et le préjudice est F.-P. Benoit, selon lequel "le dommage est un fait : c'est toute atteinte à l'intégrité d'une chose, d'une personne, d'une activité ou d'une situation" ; il possède un caractère objectif en ce sens qu'il est "perceptible indépendamment de l'idée que peut s'en faire la personne qui en est victime et des conséquences diverses qu'il peut avoir pour elle". Le préjudice est "constitué par un