Vieillissement du monde et mondialisation du vieillissement
Michel LORIAUX
Institut de Démographie
UCL – Belgique
INTRODUCTION : EN ROUTE POUR LA PLANÈTE DES VIEUX
A l’instar des êtres humains, le monde qui les abrite vieillit et cette découverte a fait figure d’une révélation à la fin du XXème siècle. Bien sûr, il ne s’agit pas ici d’évoquer l’âge physique du monde, au sens de son avancée dans l’échelle chronologique, car quelques années en plus dans son histoire millionnaire ne changeraient guère sa face, mais bien de parler de l’âge de ses habitants, qui ne cesse de s’élever au point que la planète bleue a été rebaptisée par certains observateurs la « planète des vieux » .
Que s’est-il donc passé qui a suscité une telle vague d’intérêt, mais aussi souvent d’inquiétude, pour un phénomène qui jusque là ne concernait guère qu’une poignée de pays industrialisés et n’excitait la curiosité que de quelques démographes ?
En fait, ceux-ci savaient déjà depuis assez longtemps que la dynamique d’une population pouvait la conduire à une transformation profonde de sa structure par âge dans le sens d’une augmentation importante de la part relative des personnes dites âgées, mais la lenteur du phénomène dans son évolution historique réelle et le fait qu’il ne semblait concerner que les pays riches incitèrent souvent les experts et les décideurs à ne pas s’en préoccuper outre mesure, exception faite de quelques visionnaires, comme Alfred Sauvy que sa hantise de la « dépopulation » amènera à désigner sans cesse le vieillissement comme un malheur collectif à combattre avec vigueur .
Th. Eggerickx et D. Tabutin (2001, p. 5) rappellent opportunément à ce propos que « le vieillissement démographique des pays riches ne sera même pas à l’ordre du jour de la Conférence de Bucarest en 1974 », tandis que l’historien anglais P. Laslett (1999) estime dans un article consacré à « la lente émergence du troisième âge » que ce n’est qu’à partir de la décennie 80 que « l’on commence