Violence contextes sociaux
La prise en compte des régulations sociales intermédiaires dans le procès de pacification des moeurs.
Marcel Calvez,
Laboratoire d’anthropologie et de sociologie,
Université Rennes 2
Il est une idée relative aux relations entre la violence et l’organisation sociale, selon laquelle le contrat social protège de la violence. Elle est mobilisée dans les analyses qui traitent la violence comme une pathologie sociale ou comme un produit de la désorganisation sociale. L’agressivité balayerait d’un coup les modalités intériorisées du contrat social et déboucherait sur des formes diversifiées de violence. Cette idée empêche de saisir pleinement les relations de complémentarité qui existent entre la violence et l’ordre social. Plutôt que de s’intéresser aux dimensions manifestes d’une violence liée à la désorganisation sociale, ce propos vise à contribuer à une approche de la violence constitutive de l’ordre social.
Nos sociétés sont marquées par un procès global de pacification des moeurs qui a considérablement réduit les violences aux personnes et les a canalisées en des règles de conduite en société. Parallèlement, elles ont connu une mise en oeuvre de violences collectives, dont à maints égards la destruction des Juifs constitue l’idéal-type. Enfin, de façon récente, elles semblent se caractériser par un regain de violences dans des situations de la vie quotidienne. Partir d’une dichotomie entre une société pacifiée et des violences aux marges ne permet pas de comprendre pleinement en quoi les violences participent à la formation de l’ordre social. Les penser de façon conjointe conduit à s’intéresser à leur combinaison dans les institutions sociales, c’est à dire dans les arrangements stabilisés de relations entre individus. On s’éloigne ainsi d’une approche globale de la société comme une totalité marquée par un procès global de pacification des moeurs pour s’intéresser aux contextes sociaux qui orientent les actions des