Voila
Croire que le mari. que j'ai su vous élire.
Que ne te parles-tu ?
DORINE
Je n'ai rien à me dire.
ORGON
Encore un petit mot.
DORINE
Il ne me plaît pas, moi.
ORGON
Certes, je t'y guettais.
DORINE
Quelque sotte, ma foi !
ORGON
Enfin, ma fille, il faut payer d'obéissance,
Et montrer pour mon choix entière déférence.
DORINE, en s'enfuyant.
Je me moquerais fort de prendre un tel époux.
Il lui veut donner un soufflet et la manque.
ORGON
Vous avez là, ma fille, une peste avec vous,
Avec qui sans péché je ne saurais plus vivre.
Je me sens hors d'état maintenant de poursuivre ;
Ses discours insolents m'ont mis l'esprit en feu,
Et je vais prendre l'air pour me rasseoir un peu.
Introduction
Une scène qui se situe juste après la nouvelle foudroyante du mariage prévu par Orgon entre sa fille et Tartuffe.
Trois formes de comique s'y mêlent : comique de situation ; comique de geste (surtout à la fin de la scène) ; comique de caractère.
1. Le personnage d'Orgon
C'est un homme changeant et assez versatile.
a) l'homme autoritaire du début (vers 165), qui cherche ainsi à masquer sa faiblesse ;
b) le coléreux, qui s'emporte assez facilement (vers 471), mais qui choisit pourtant son vocabulaire ("courroux" : un terme recherché, vers 471 ; ton du vers 551 également).
c) l'homme bien élevé qui vouvoie sa servante et doit jouer un rôle en tant qu'homme de bien ; d'où l'efficacité du vers 552 : Orgon est à la recherche d'une vie exemplaire ; or la colère est l'un des sept péchés capitaux : Dorine paralyse Orgon par ses propos et Orgon ne peut que reconnaître sa défaite à la fin de la scène : il a l'air d'un sage (vers 473) mais il n'est qu'un sot ! C'est un homme qui manque de force et se démonte facilement.
d) le vaniteux, fier de faire la charité (cf. vers 490) : les actes de dévotion lui permettent de réaliser son rêve et de se donner bonne