L’HISTORIEN FAIT L’HISTOIRE
" Le document n’était pas document avant que l’historien n’ait songé à lui poser une question, et ainsi l’historien institue, si l’on peut dire, du document en arrière de lui et à partir de son observation ; par là même il institue des faits historiques. "
Paul Ricoeur, Histoire et Vérité (1955), « Objectivité et subjectivité en histoire ».
PROBLÉMATIQUE
Le fait historique se donne-t-il tel quel à l’historien ou est-il (re)construit par ce dernier ?
EXPLICATION
Pas de trace ni de compréhension du passé sans historien
C’est l’historien qui, rétrospectivement, institue une réalité présente comme document et comme fait historiques. En effet, le passé n’est plus et n’est connaissable qu’à partir de ses traces présentes. Mais le présent ne fait pas naturellement signe vers le passé : il faut lui poser certaines questions. Telle est la tâche de l’historien. De plus, aucun événement ne livre tout son sens quand il a lieu, et certains événements n’auront même jamais été vécus comme tels (qui a vécu la totalité de la chute de l’Empire romain ?).
L’histoire à rebours
L’histoire ne coule donc paradoxalement pas du passé vers le présent (où l’historien n’aurait qu’à la consigner), mais plutôt du présent vers le passé (par la reconstruction de l’historien). Les faits historiques ne préexistent pas au travail de l’historien : c’est lui qui les institue. L’histoire ne cesse alors de se renouveler, à mesure que se renouvellent les perspectives et la compréhension des historiens.
DÉBAT ET ENJEU
Subjectivité et objectivité
L’histoire est-elle inévitablement déformée par la subjectivité de l’historien ? Non, car l’historien vise une certaine objectivité, dont il s’assure par des règles de méthode rigoureuses et spécifiques (critique des documents, etc.). Il cherche les relations de causalité entre les événements, pour rendre intelligible le passé (par exemple, en quoi la famine a concouru au déclenchement de la Révolution de 1789).