« L’art n’est pas fait pour peindre les exceptions »
Ce propos, qui constitue une prise de position esthétique clairement formulée, et qui pourrait être entendu comme un véritable manifeste en faveur du réalisme (auquel on se souvient que Flaubert, en vérité, était hostile !) se trouve dans une lettre de Gustave Flaubert à George Sand que l’on reproduit intégralement ci-dessous. Il souligne les divergences entre ces deux prosateurs. Cette citation pose une série de problèmes touchant à la question mise au programme : « Littérature et réalité ». En voici quelques-uns, susceptibles de nourrir et d’orienter la réflexion : • L’art a-t-il une fonction (est-il « fait » pour quelque chose ?) qui détermine sa substance, sa matière, son champ d’inspiration ? • Que peut-on entendre par « exceptions » en art, et plus spécialement dans l’écriture romanesque ? De quelles espèces celles-ci peuvent-elles être ? Actions extraordinaires ? Personnages héroïques ? Psychologies hors du commun ? • Si l’art n’est pas fait pour peindre des exceptions, le réel est-il sa matière première ? Mais qu’est-ce, dès lors, que peindre le réel ? Le reproduire ? L’analyser ? • Et dès lors qu’un « sujet » quel qu’il soit, est traité dans une œuvre d’art, ne devient-il exceptionnel par là-même ? Est-ce, en général, l’objet qui est exceptionnel, ou bien le traitement que « l’art » lui fait subir ? • Ne peut-on distinguer un art qui puise son inspiration ou ses sujets parmi les exceptions (et les traite de manière telle qu’elles deviennent porteuses d’un savoir commun, partageable) et un art qui va chercher dans le commun son inspiration et ses sujets et les traite de manière telle qu’ils apparaissent exceptionnels ? Texte intégral de la lettre de Gustave Flaubert : À George Sand.