L'aventure ambigue
ANDRZEJ DZIEDZIC
LA REPRÉSENTATION DE LA MORT DANS L’AVENTURE AMBIGUË DE CHEIKH HAMIDOU KANE.
Dans un article publié dans les pages de la Vie Africaine en juillet 1961, Olympe Bhely-Quenum a constaté à propos de l’Aventure Ambiguë: «Voilà un beau livre! Le récit est bien campé, dans un style précis un peu juridique, mais vivant. Et il ne datera pas, parce qu’il pose le problème de l’ambiguïté, un des fondements de la coexistence des hommes». 1 Cette phrase résume bien l’intérêt profondément universel ainsi que la portée philosophique du roman de Cheikh Hamidou Kane. L’Aventure Ambiguë se situe au coeur d’un conflit entre deux systèmes philosophiques majeurs que se partage le monde, notamment le rationalisme matérialiste et le mysticisme.2 A la pensée technique de l’Occident, tournée vers l’action, l’auteur oppose la pensée de l’Islam, repliée sur elle -même. Au carrefour des deux cultures se place le drame personnel de Samba Diallo, un jeune Sénégalais écartelé entre ses racines africaines, son éducation musulmane et sa formation intellectuelle française. L’action du roman c’est avant tout la description de l’évolution de ce personnage, un récit qui retrace les épisodes de la formation du jeune Africain. Cependant, au-delà de cette confrontation surgit le problème fondamental de l’homme moderne ou plutôt l’angoisse d’être homme. Il
1 Cité dans Ki-Zerbo, Joseph, «Histoire et conscience nègres», Présence Africaine 30 (1957): 53. On trouvera les principaux articles consacrés à L’Aventure Ambiguë dans les revues suivantes: Présence Africaine, Annales de l’Université d’Abidjan, Ethiopiques, Présence Francophone, Etudes Littéraires, Diogène, L’Afrique Littéraire et Artistique, Revue de Littérature Comparée, Kentucky Romance Quarterly, Yale French Studies. Evidemment des critiques connus (Anozie, Blair, Dathorne, Brench) ont inclus une