L'interference
La structure élémentaire de l’énoncé dans la syntaxe d’André Martinet
Remi JOLIVET Université de Lausanne
Résumé. La syntaxe générale développée par André Martinet est mal connue et rarement discutée. Elaborée en pleine cohérence avec une définition stricte de la notion de «langue» et une conception de la linguistique comme champ de recherche autonome, elle ne s'inféode ni à la psychologie ni à la logique et récuse tout universel non déductible de la définition de la langue. Aussi fréquente soit-elle, l'existence d'un prédicat n'est pas un universel, moins encore celle d'un sujet et la structure sujet-prédicat n'est qu'un cas particulier de formation de l'énoncé minimum qui n'existe pas obligatoirement dans toutes les langues. Cette contestation du statut universel de ces notions n'empêche pas d'en donner une définition générale, valable pour toutes les langues où elles sont applicables. C'est dans le processus d'actualisation — également redéfini — qu'il faut chercher l'explication de la fréquence, dans les langues du monde, d'une construction bipartite de l'énoncé minimum. Mots-clés. actualisation; André Martinet; énoncé minimum; prédicat; sujet; syntaxe fonctionnelle.
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Cahiers de l’ILSL, N° 25, 2008
Les contributions d'André Martinet à la phonologie synchronique et diachronique et à l'élaboration d'une linguistique générale, structurale et fonctionnelle, sont bien connues. On sait moins, peut-être, hors du cercle de ceux qui bénéficièrent de son enseignement, que son intérêt pour l'étude de la fonction significative se traduisit, dès 1950, par un article sur l'opposition verbo-nominale et que Martinet n'a pas cessé, depuis cette date, de développer ce versant de l'analyse linguistique. Ses réflexions ont été reprises et synthétisées dans Syntaxe générale en 1985. L'ouvrage est épuisé et n'a pas été réédité. Cette destinée éditoriale, qui contraste fortement avec celle des Eléments de linguistique