L'abbaye de theleme
La fondation de l’abbaye de Thélème, qui occupe les six derniers chapitres du roman (du chap.52 à la fin), sert de conclusion au roman. Elle correspond au moniage des romans de chevalerie : le chevalier, ayant achevé son apprentissage, se retire du monde pour entrer en religion.
Ici, ce moniage est paradoxal puisque les Thélémites, non seulement ne se coupent pas définitivement du monde, mais encore vivent comme des châtelains aisés.
Le nom de « Thélème », inventé par Rabelais, est formé à partir du verbe grec thélô, qui signifie « vouloir » en grec classique. Le mot « théléma », dérivé de ce verbe, signifie « volonté ». Il apparaît surtout dans le Nouveau
Testament, on le trouve notamment dans Le Notre Père : dans l’invocation
« Que ta volonté soit faite », c’est « théléma » qui est employé. Mais ici, il est question de la liberté des hommes et non de la volonté divine. La devise de l’abbaye, en effet, est « FAIS CE QUE VOUDRAS ». Il s’agit donc d’une abbaye essentiellement fondée sur un principe de liberté.
1. Une abbaye « à rebours de toutes les autres », à l’image de Frère Jean
a) Frère Jean, un moine « à rebours » des autres moines
Comme nous l’avons déjà évoqué dans le chapitre sur le personnage de Frère Jean, cette abbaye a été fondée par Gargantua pour récompenser celui-ci. Le moine n’en fait toujours qu’à son idée. Il est toujours « à rebours » de tout et de tous, que ce soit dans son abbaye de Seuilly ou à la guerre. Il ne semble pas qu’il agisse ainsi par esprit de contradiction mais plutôt par indépendance d’esprit, par liberté vis-à-vis de l’ordre établi. Il ne cherche, comme nous l’avons vu, aucun honneur, aucune récompense. Il sait que ce qui lui convient n’existe pas encore et qu’il faut le créer. C’est pourquoi, lorsque Gargantua lui propose de diriger une abbaye préexistante, il rejette sa proposition, allant jusqu’à refuser les plus prestigieuses abbayes bénédictines de la région (Bourgueil