Curieux roman que L’Alchimiste de Paulo Coelho. Je viens d’en terminer la lecture, la deuxième depuis un an. Une amie m’avait envoyé le livre, en version anglaise, pensant que je l’apprécierais. Je l’avais lu avec plaisir, mais sans me sentir concerné, un peu parce que c’était un cadeau et qu’il fallait que j’en dise du bien à cette amie. Mais aujourd’hui, un an après, je le lis autrement. Je le lis en pensant à mes étudiants pour qui le thème du voyage est en train de devenir une préoccupation et il me semble que je le lis avec leurs yeux, avec un enthousiasme que je n’avais pas l’an passé. Curieux roman. Mais est-ce un roman? Ce serait bien plutôt une fable. Le roman n’enseigne rien, ne cherche pas (ou plus) à conclure, à laisser le lecteur sur la crête d’un savoir ou d’une méditation. Le roman s’est développé au rythme du monde, dans la frénésie du réalisme qui l’oblige à refléter nos préoccupations. La fable connaît un tout autre rythme. Les événements de la fable disent une chose et en sous-entendent bien d’autres. Tout comme l’attaque d’un épervier par un autre sous-entendait l’attaque de l’oasis. Curieux roman. Porte-t-il bien son titre? Je ne sais pas. Il me semble que le personnage de l’Alchimiste, bien qu’il joue un grand rôle, n’en apprend pas plus à Santiago que le marchand de cristaux ou que le vieux roi ou que l’Anglais ou que Fatima. Évidemment, c’est l’idée de transformation, de métamorphose que porte en lui le titre qui doit rester. La fable tout entière questionne la condition de l’homme qui l’oblige sans arrêt à changer, à avancer, à se métamorphoser, à poursuivre ses rêves et à devenir dans un environnement lui-même en devenir. Si le voyage vers les pyramides est en même temps un voyage vers lui-même pour Santiago, c’est bien à cette condition-là. Rien ne demeure inchangé. Mais ces métamorphoses reposent sur un paradoxe et peut-être même une contradiction que la fable ne cesse d’exposer et sur laquelle elle s’entortille comme autour