L'europe peut-elle inventer un federalisme specifique ?
L’Europe peut-elle inventer un fédéralisme spécifique ?
Jean-Louis Quermonne*
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LA REVUE INTERNATIONALE ET STRATÉGIQUE JEAN-LOUIS QUERMONNE ■ Dans le discours-programme qu’il a prononcé le 13 février 2001 devant le Parlement européen, le président Romano Prodi, considérant la situation de l’Union européenne comme alarmante, a déclaré que « la réflexion ouverte ne peut plus être refermée : nous sommes arrivés à la fin d’une logique, celle des non-dits et des ambiguïtés “constructives”. Nous sommes donc maintenant dans une phase nouvelle, confrontés à des questions de fond qui ne peuvent plus être escamotées ». Or, au centre de ce questionnement figurent le problème de la fédération européenne et la recherche de sa spécificité. Certes, l’on conçoit que, désirant achever un « round » qui a commencé à Maastricht et qui n’a pu être conclu à Amsterdam, la présidence française ait cherché, en décembre 2000, à limiter son ambition au règlement des problèmes institutionnels demeurés en suspens, afin d’ouvrir la voie aux prochains élargissements. De ce point de vue, toute réflexion sur les finalités de l’intégration anticipant sur l’ordre du jour du Conseil européen de Nice a pu lui sembler prématurée. Mais le discours de Joschka Fischer prononcé à Berlin le 12 mai 2000, auquel Jacques Chirac a répondu partiellement le 27 juin au Bundestag, a rendu sa position inconfortable. D’où, pour une part, les difficultés rencontrées à Nice par les chefs d’État et de gouvernement, et qui ont obéré le sommet. Quoi qu’il en soit, désormais la Déclaration no 23 relative à l’avenir de l’Union, annexée au traité, impose un débat de fond qui ne saurait laisser de côté, pour des raisons diplomatiques, aucune « question qui fâche ». Et l’opinion publique mécontente, selon les sondages, de la construction européenne mais désireuse d’une intégration plus poussée1, ne comprendrait pas que le sommet de Laeken se déroule sans qu’au