L'existence et le temps
Introduction
Le terme d´existence soulève d´emblée la question de savoir à quelles réalités il s´applique.
De tout ce qui possède une réalité, nous pouvons dire qu´il existe : je parlerai donc indifféremment de l´existence de cette pièce, où je travaille, de celle des objets qui s´y trouvent, mais aussi de l´existence du pays où je vis, de celle des êtres qui m´entourent, de ma propre existence, comme de celle du monde lui-même, auquel tout ce qui vient d´être mentionné appartient. Je parlerai même, si j´en suis convaincu par ma croyance ou par ma raison, de l´existence de Dieu. Ainsi, Descartes, dans ses Méditations métaphysiques (1641), après avoir éprouvé, dans l´expérience du cogito, que sa propre existence résiste au doute (« je suis, j´existe », écrit-il dans la Méditation seconde), peut écrire tout aussi bien que, l´idée de Dieu inscrite dans son esprit lui apparaissant trop riche de déterminations infinies pour que cet esprit en soit la seule origine, « il faut nécessairement conclure que Dieu existe » (Méditation troisième). En ce premier sens, aussi courant dans la langue de tous les jours que dans celle de la philosophie, se forger une notion de l´existence imposerait donc seulement de savoir comment entendre une détermination commune à tout ce dont nous ne pouvons pas dire qu´il n´est rien. Seul le rien n´existe pas : exister, au sens de l´existence en général, c´est être.
Il se trouve cependant aussi certains usages du terme d´existence qui en réservent l´emploi à des réalités plus spécifiques. Quand je dis d´une personne qu´elle n´existe pas vraiment ou qu´à telle ou telle occasion je me sens exister, le sens du mot devient différent : cette personne qui, à mes yeux, n´existe pas vraiment, je sais bien pourtant qu´elle n´est pas rien ; et moi-même, quand soudain il me semble que je me mets à exister, je ne pense pas un seul instant qu´auparavant j´étais dépourvu de tout être. Bref, dans un second sens (que nous pourrions,