L’utilisation de l’histoire en politique

L’utilisation de l’histoire en politique n’est pas un phénomène nouveau. Il a été au coeur de grandes réflexions philosophico-politiques suivant les siècles, mais se trouve aujourd’hui renforcé et vivement critiqué, compte tenu de l’appropriation massive des responsables politiques face à cette discipline qui souhaite garder toute son indépendance. L’imbrication de l’histoire dans la sphère publique est un débat qui s’est trouvé ranimé par la multiplication de lois mémorielles qui imposent le souvenir du crime massif ou du génocide à l’encontre des différentes minorités communautaires qui ont subies un tel massacre. À l’origine, la première loi mémorielle a été établie pour contrer la publicité des thèses négationnistes de Faurisson qui remettait en cause le génocide des juifs. Il fallait trouver un moyen de reconnaitre la douleur des survivants et descendants des victimes face à ces remises en cause de l’Histoire récente. La première loi mémorielle appelée « loi Gayssot » ne suscitait pas de polémique importante : elle consolidait le devoir de mémoire vis-à-vis de l’Holocauste, et réprimait ceux qui remettaient en cause les faits génocidaires qui aujourd’hui sont pleinement avérés. C’est l’article 4 de la loi du 23 février 2005 qui enclenche de nombreuses dénonciations vis-à-vis de ce devoir mémoriel, puisqu’il impose aux manuels scolaires de vanter les conséquences positives de la colonisation française.
S’il est avéré que le devoir de mémoire face à des crimes massifs ou des génocides perpétrés sur une communauté doit faire partie intégrante de la conscience nationale, doit-on pour autant considérer que ce travail relève de la responsabilité politique ?
Nous traiterons dans un premier temps le danger des lois mémorielles quant à l’objectivité historique, puis nous aborderons les justifications politiques quant à l’appropriation de l’histoire.

I : La colère des historiens face à l’Histoire inscrite dans la