1_EtudesRomanesDeBrno_42 2012 1_30
33, 1, 2012
GHEORGHE DERBAC
« PRÉSENT PASSÉ, PASSÉ PRÉSENT 1 » : ÉCRITURE ET ÉCHOS
DE L’HISTOIRE DANS REQUIEM POUR L’EST 2 ET LA VIE
D’UN HOMME INCONNU 3 D’ANDREÏ MAKINE
Des fractures historiques comprenant les grands événements du XXe siècle, avec une propension pour la période communiste de l’histoire russe, traversent l’œuvre d’Andreï Makine. Cette mise en scène de l’Histoire s’articule autour des personnages qui remplissent le rôle de témoins, stratégie littéraire employée fréquemment par l’auteur pour donner force à ses romans. Dans La transcription de l’histoire. Essai sur le roman européen de la fin du XXe siècle, Emmanuel Bouju, reprenant l’idée de « poétique de la voix » de Dominique Rabaté4 dans le contexte
« de la parole attachée à transcrire l’expérience historique5 », soutient :
Alors se dessine une poétique de la voix (pour emprunter une formule à Dominique Rabaté) qui reprend l’ancien débat témoignage ou fiction pour le désamorcer et le faire servir à une esthétique où la présence du témoin, même feinte, est reçue par le lecteur comme garante d’une vérité propre : le modèle est celui d’un récit fondé sur la présentation (intégration au présent) des témoignages absents, disparus – que garantit paradoxalement la seule puissance de la fiction6.
Requiem pour l’Est (RE) et La Vie d’un homme inconnu (VHI) dessinent un grand panorama du passé russe en retraçant les destins de personnages qui auraient vraisemblablement vécu des événements comme les deux conflagrations mondiales, l’avènement du communisme avec ses affres, les guerres de décolonisation, l’effondrement du bloc soviétique, etc. Le premier roman retrace le destin du narrateur depuis son enfance orpheline dans l’URSS jusqu’à sa vie d’écrivain dans le milieu littéraire parisien. Dans le deuxième roman on apprend les his1
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Syntagme emprunté au titre de l’ouvrage d’IONESCO, Eugène. Présent passé, passé présent. Paris : Mercure de France, 1968.
MAKINE,