Alfred chandler
Alfred Chandler, apôtre du capitalisme managérial
Denis CLERC Alternatives Economiques n° 131 - novembre 1995 La seconde révolution industrielle de la fin du XIXe siècle a bouleversé le schéma classique de l'entreprise. L'avenir, selon Alfred Chandler, repose dorénavant sur une équipe de managers, marqués par le soucis du long terme, de la croissance et de l'investissement stratégique. Leurs noms sont connus de tous: Remington, Westinghouse, Coca-Cola, Ford, Du Pont, Esso, Alcoa, U.S. Steel… Ces grandes firmes américaines tiennent le haut du pavé depuis un siècle ou presque: elles sont nées de ce que Alfred Chandler appelle la " seconde révolution industrielle ", survenue dans les dernières décennies du XIXe siècle. Jusqu'alors, l'activité industrielle utilisait certes des machines, mais l'essentiel de ses coûts de production consistait en main-d'oeuvre, en énergie, en matières premières et en transport. Produire peu ou beaucoup ne modifiait pas fondamentalement les données de base pour l'entreprise, puisque ses coûts évoluaient à peu près au rythme de ses recettes. La seconde révolution industrielle bouleverse ce schéma avec l'arrivée des hauts fourneaux, laminoirs, raffineries ou (un peu plus tard) chaînes de montage… La production industrielle s'appuie, dans bon nombre de branches, sur un outil de production beaucoup plus complexe. Pour amortir ces installations coûteuses, il devient essentiel de produire massivement. Les coûts étant surtout des coûts fixes (amortissement des équipements, des brevets, des dépenses de mise au point, etc.), chaque unité supplémentaire produite coûte peu, donc dégage une marge élevée. Ce qui distingue la firme performante de celle qui ne l'est pas, ce n'est pas l'équipement, mais la capacité à l'utiliser au mieux: c'est-à-dire trouver des débouchés pour réaliser des économies d'échelle (réduction des coûts unitaires grâce à une production accrue) ou des économies de diversification (le même équipement est utilisé