Anthologie
Te voilà, rire du Printemps !Les thyrses des lilas fleurissent.Les amantes qui te chérissentDélivrent leurs cheveux flottants.
Sous les rayons d’or éclatantsLes anciens lierres se flétrissent.Te voilà, rire du Printemps !Les thyrses de lilas fleurissent.
Couchons-nous au bord des étangs,Que nos maux amers se guérissent !Mille espoirs fabuleux nourrissentNos cœurs gonflés et palpitants.Te voilà, rire du Printemps !
Théodore de Banville
Mai
Le mai le joli mai en barque sur le RhinDes dames regardaient du haut de la montagneVous êtes si jolies mais la barque s’éloigneQui donc a fait pleurer les saules riverains ?
Or des vergers fleuris se figeaient en arrièreLes pétales tombés des cerisiers de maiSont les ongles de celle que j’ai tant aiméeLes pétales fleuris sont comme ses paupières
Sur le chemin du bord du fleuve lentementUn ours un singe un chien menés par des tziganesSuivaient une roulotte traînée par un âneTandis que s’éloignait dans les vignes rhénanesSur un fifre lointain un air de régiment
Le mai le joli mai a paré les ruinesDe lierre de vigne vierge et de rosiersLe vent du Rhin secoue sur le bord les osiersEt les roseaux jaseurs et les fleurs nues des vignes
Guillaume Apollinaire
Perce-neige
Radieuses apothéosesDu soleil d’or et du ciel bleu,Fraîche gloire des printemps roses,Pourquoi donc durez-vous si peu ?
Pourquoi donc êtes-vous si brèves,Aubes de l’enfance ? Beaux jours,Si pleins d'arômes et de sèves,Pourquoi donc êtes-vous si courts ?
Jeunesse, où sont-elles alléesLes hirondelles de jadis ?Où sont les ailes envoléesDe tes merveilleux paradis ?
Et vous, poétiques chimères,Que dore un rayon d’idéal,Blondes idylles éphémères,N’auriez-vous qu’un seul floréal ?
Ô fleurs, vous n’êtes pas finies !Les plus tristes de nos saisonsAuront encore des harmoniesEt des regains de floraisons.
La mortelle saison du givreN’a pas tué toutes nos fleurs :Nous pourrons encore revivreLe passé, dans des jours meilleurs.
Nérée