Anthologie
Comme on voit sur la branche au mois de Mai la rose En sa belle jeunesse, en sa première fleur Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur, Quand l’Aube de ses pleurs au point du jour l’arrose :
La grâce dans sa feuille, et l’amour se repose, Embaumant les jardins et les arbres d’odeur : Mais battue ou de pluie, ou d’excessive ardeur, Languissante elle meurt feuille à feuille déclose :
Ainsi en ta première et jeune nouveauté, Quand la terre et le ciel honoraient ta beauté, La Parque t’a tuée, et cendre tu reposes.
Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs, Ce vase plein de lait, ce panier plein de fleurs, Afin que vif, et mort, ton corps ne soit que roses.
Pierre de Ronsard, Sur la mort de Marie, 1578
Sur un Tombeau
Celle dont la dépouille en ce marbre est enclose Fut le digne sujet de mes saintes amours. Las ! Depuis qu'elle y dort, jamais je ne repose, Et s'il faut en veillant que j'y songe toujours.
Ce fut une si rare et si parfaite chose Qu'on ne peut la dépeindre avec l'humain discours ; Elle passa pourtant de même qu'une rose, Et sa beauté plus vive eut des termes plus courts.
La Mort qui par mes pleurs ne fut point divertie Enleva de mes bras cette chère partie D'un agréable tout qu'avait fait l'amitié.
Mais, ô divin esprit qui gouvernait mon âme, La Parque n'a coupé notre fil qu'à moitié, Car je meurs en ta cendre et tu vis dans ma flamme.
François Tristan l’Hermite, Les Plaintes d'Acante, 1648
Chose vue un jour de printemps
Entendant des sanglots,