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Article écrit par Francis BORDAT
Prise de vue
Dès 1914, alors qu'il interprète et en majorité réalise ses trente-cinq premiers films pour la compagnie
Keystone de Mack Sennett, Charles Chaplin conquiert une célébrité que peu d'hommes ont connue de leur vivant. Le personnage de Charlot, qui apparaît dans sa deuxième bande, Charlot est content de lui, prend en quelques mois stature de mythe. L'intelligentsia participe à cet engouement : Charlot est célébré par les plus grands artistes de son temps, de George Bernard Shaw à Pablo Picasso, de Claude Debussy à Serge
Eisenstein. Louis Delluc lui consacre en 1921 la première monographie jamais publiée sur un cinéaste. Près d'un siècle plus tard, les centaines de livres et les milliers d'articles qui lui ont été consacrés dans toutes les langues n'ont toujours pas épuisé son sujet.
I-L'enfance londonienne
Charles Spencer Chaplin est né à Londres le 16 avril 1889, de parents artistes de music-hall. Sa mère
Hannah l'élève seule avec son demi-frère aîné Sydney tandis que son père sombre dans l'alcoolisme, fléau du music-hall londonien. L'absence de succès professionnel de la jeune femme et la maladie mentale qui la ronge plongent la famille dans le dénuement. Quand elle est internée en 1896, Charles et Sydney sont confiés à l'orphelinat de Hanwell, dans la banlieue de Londres. Ils ne retrouveront leur mère que pour de brèves périodes et mèneront une vie d'errance et de pauvreté. Charles Chaplin sera durablement marqué par les difficultés matérielles et les angoisses affectives de cette petite enfance. Leur souvenir imprègne l'œuvre, où le coin de rue « en T » des taudis londoniens constitue, de Charlot policeman (1917) aux Feux de la rampe (1952), un décor récurrent, tout comme le thème quasi obsessionnel de la faim, d'Une vie de chien
(1918) aux Temps modernes (1936), en passant par La Ruée vers l'or (1925).
Les bonheurs du jeune garçon sont ceux du music-hall où il se produit dès son plus jeune