Camile hamidi
CAMILLE HAMIDI
i les travaux sur le capital social ont connu un tel retentissement dans le monde des sciences sociales et au-delà 1, alors qu’ils ont fait l’objet de critiques virulentes 2, c’est qu’ils reposent sur des représentations largement partagées de la société civile et de l’engagement associatif, en particulier. Face à la crise de la participation politique, à la remise en question des formes traditionnelles du militantisme, qui serait caractérisé par un don et un oubli de soi peu conformes aux aspirations à l’autonomie individuelle en vigueur aujourd’hui, face au fossé qui se creuserait entre les représentants politiques et leurs mandants, et enfin, face à la remise en cause de l’efficacité et de l’ampleur de l’intervention étatique, la société civile est invoquée comme le lieu où renouer le lien social, restaurer la démocratie participative, établir des pratiques militantes plus distanciées 3 ou encore « faire de la politique autrement ». De telles analyses, qui rejoignent des débats déjà anciens 4, sont fondées sur une théorie sous-jacente des vases communicants selon laquelle l’engagement associatif viendrait peu à peu remplacer un engagement partisan affecté par le discrédit touchant le champ politique dans son ensemble et sur l’hypothèse selon laquelle le monde associatif constituerait un lieu de politisation pour les adhérents. Une telle hypothèse n’est pas sans fondement empirique. Dans une étude récente et détaillée du cas français, Nonna Mayer démontre ainsi que le fait d’appartenir ou non à une association exerce une influence réelle et notable sur le degré de politisation des individus 5, celui-ci étant mesuré par trois indicateurs : le niveau de connaissances
S
1. Notamment autour des travaux de Robert D. Putnam, « Bowling Alone. America’s Declining Social Capital »,