Charles Baudelaire
Baudelaire
Le maître-livre de Baudelaire va être conçu, élaboré et publié à une époque où l’Histoire rencontre le destin des hommes. Le poète a en effet été violemment traumatisé par les événements de 1848 auxquels il prit une part active. Il qualifia cet engagement soudain pour la république d’ « ivresse », de « fureur », et de « plaisir naturel de la démolition » (Mon cœur mis à nu). Cependant cette passion ne fut que passagère. Le coup d’Etat du deux décembre 1851 le traumatise plus brusquement encore que l’insurrection populaire de 1848. Il entraîne en effet chez lui une révision radicale de ses positions et de ses enthousiasmes. Il ira même jusqu’à se ranger sous la bannière de Joseph de Maistre et ne cessera plus de cribler de ses sarcasmes toutes les idéologies républicaines de progrès et d’exaltation de la réalité sociale.
Cependant il est nécessaire de rappeler ce qu’il y a de rage humiliée dans cette attitude. Il est en effet découragé par le manque de réaction du peuple, en qui il essayait de s’identifier en 1848. Le dégoût du poète pour toute idée sensée mener à l’amélioration de la condition humaine rejoint celui de la société en général, peuple et bourgeoisie compris. C’est vers cette époque que Baudelaire abandonne le titre Les Limbes (qui montrait ses anciennes influences fouriéristes) pour adopter celui des Fleurs du Mal.
Cependant c’est surtout lui-même que Baudelaire met dans son livre. Il l’avoue lui-même dans une lettre à M. Ancelle le 18 février 1866 : « Faut-il vous dire à vous qui ne l’avez pas plus deviné que les autres que dans ce livre atroce, j’ai mis tout mon cœur, toute ma tendresse, toute ma religion (travestie), toute ma haine ? »
Baudelaire montre ainsi toute sa volonté de « démystifier » la sensibilité romantique. En ce sens Les Fleurs du Mal expriment une extraordinaire prise de conscience de la vraie nature du fait poétique. On a souvent répété que le recueil