Comme un chevreuil
Le poète s'attache à développer un récit plein de vivacité et de charme, dans les neuf premiers vers. Il s'agit bien de peindre une scène bucolique : « ut pictura poesis » (Horace, Art poétique). Les indications concrètes sont nombreuses et précises.
a. Evocation du printemps triomphant de l'hiver
Sur le moment d'abord : l'enjambement du vers 1 à 2 contribue à mettre en valeur ce moment précieux où une saison s'efface devant l'autre. Le printemps triomphe de l'hiver caractérisé ici par un choix précis d'adjectifs évoquant l'hostilité : « morne » vers 2. La douceur du printemps est ensuite mise en valeur au travers de la métaphore de « herbette emmiellée » (vers 3) donc douce et sucrée, adjectif mélioratif qui forme un contraste saisissant à la rime avec « gelée » du vers 2.
b. Description de l'heureuse liberté du chevreuil...
Le lecteur suit ensuite les déplacements du chevreuil grâce aux nombreuses indications de lieu du poème : « hors de son bois » (vers 4), « or' sur un mont, or' dans une vallée » (vers 6), « or' près d'une onde » (vers 7). Mise en valeur de ces déplacements grâce au jeu sur les alternatives à l'intérieur du vers 6, un rythme binaire qui établit un strict parallélisme entre les deux hémistiches. Les verbes de mouvement contribuent aussi au dynamisme de la scène, souvent mis en valeur en fin de vers : le verbe « s'enfuit » à la fin du vers 4 qui trouve comme un écho lointain au vers 8 avec « conduit ». Ronsard s'attache donc à décrire l'élan heureux d'un animal sauvage qui ne connaît que sa seule loi, comme le montre le choix des adjectifs au vers 8 : « libre, folâtre ».
c. ... inconscient des dangers qui le menacent
Il s'agit aussi de montrer le sentiment de sécurité dans lequel vit l'animal, inconscient des dangers qui le menacent : le vers 5 souligne cette tranquillité insolente, bien mise en valeur également par le jeu discret des sonorités et l'anaphore de « et » : « Et seul, et