Commentaire de texte, maurice merleau-ponty, « le doute de cézanne » (paragraphe 18 page 25-26.).
« Le doute de Cézanne » (Paragraphe 18 page 25-26.).
Texte :
« L'incertitude et la solitude de Cézanne ne s'expliquent pas, pour l'essentiel, par sa constitution nerveuse, mais par l'intention de son œuvre. L'héridété avait pu lui donner des sensations riches, des émotions prenantes, un vague sentiment d'angoisse ou de mystère qui désorganisaient sa vie volontaire et le coupaient des hommes ; mais ces dons ne font une œuvre que par l'acte d'expression et ne sont pour rien dans les difficultés comme dans les vertus de cet acte. Les difficultés de Cézanne sont celles de la première parole. Il s'est cru impuissant parce qu'il n'était pas omnipotent, parce qu'il n'était pas dieu et qu'il voulait pourtant peindre le monde, le convertir entièrement en spectacle, faire voir comment il nous touche. Une théorie physique nouvelle peut se prouver parce que l'idée ou le sens est relié par le calcul à des mesures qui sont d'un domaine déjà commun à tous les hommes. Un peintre comme Cézanne, un artiste, un philosophe, doivent non seulement créer et exprimer une idée, mais encore réveiller les expériences qui l’enracineront dans les autres consciences. Si l’oeuvre est réussie, elle a le pouvoir étrange de s’enseigner elle-même. En suivant les indications du tableau ou du livre, en établissant des recoupements, en heurtant de côté et d’autre, guidés par la clarté confuse d’un style, le lecteur ou le spectateur finissent par retrouver ce qu’on a voulu leur communiquer. Le peintre n’a pu que construire une image. Il faut attendre que cette image s’anime pour les autres. Alors l’oeuvre d’art aura joint ces vies séparées, elle n’existera plus seulement en l’une d’elles comme un rêve tenace ou un délire persistant, ou dans l’espace comme une toile coloriée, elle habitera indivise dans plusieurs esprits, présomptivement dans tout esprit possible, comme une acquisition pour toujours. »
Cézanne a souvent exprimé les