Victor Hugo est connu pour ses prises de position et son engagement sur différents sujets comme la peine de mort ou la misère. Ce dernier thème figure au centre de ses écrits, que ce soit en tant qu'écrivain avec "Les Misérables", par exemple, ou en tant qu'homme politique dans les nombreux discours qu'il prononça devant l'Assemblée, par exemple celui qui nous intéresses ici, prononcé le 30 juin 1850. Hugo déploie dans cette intervention toutes ses qualités d'écrivain et d'orateur pour dénoncer la misère et choquer ses destinataires afin qu'ils réagissent et agissent politiquement contre ce fléau. Par quels moyens Hugo nous donne-t-il donc à voir la réalité atroce de cette misère? Nous verrons dans un premier temps que ce discours met en place un lien puissant entre l'orateur et les destinataires. Puis nous analyserons la description terrible que fait l'auteur de cette misère.

Comme dans tout discours, le lien entre émetteur et destinataire est explicite. Il s'agit ici d'un discours délibératif, qui veut faire réagir. Hugo s'exprime en tant que député à l'Assemblée à ses confrères, mais il s'implique avec force dans ce qu'il dénonce, en employant la première personne du singulier. Il est ici un témoin direct, est allé sur le terrain comme un enquêteur pour pouvoir en parler en connaissance de cause comme le montre l'expression "on m'a montré". Il est acteur, interlocuteur, demande des précisions à ces "misérables" qu'il a rencontrés et en restitue le dialogue au mot près par le biais du discours direct : "j'ai insisté : vous ne les ouvrez donc jamais ? - Jamais monsieur !". Son indignation éclate à chaque ligne, et les nombreuses interjections et phrases exclamatives sont là pour nous le montrer, nous rappelant qu'il s'agit bien d'un discours prononcé avec un ton particulier : "Hé mon Dieu !", "Ah !", "Eh bien"... Il emploie également le pronom "nous" qui semble créer deux "camps" bien distincts : ceux qui sont allés voir de leurs yeux ces misères, et les