A. COCHON, Le travail entre labeur et valeur : la corvée royale au XVIIIe siècle
Cahiers d’Histoire, Revue d’Histoire critique, Penser le travail à l’époque moderne, XVIIe- XIXe
Editions Centre national du livre, octobre-décembre 2009

Dans cet article, Anne COCHON, professeur à Paris 1-Panthéon-Sorbonne, s’intéresse à la corvée, ces journées de travail collectives gratuites dues à la société par les roturiers pour assurer notamment l’entretien des routes, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. En effet à cette époque, celle-ci fait l’objet d’un intense débat concernant sa légitimité. Partant des mots la désignant, Anne COCHON s’intéresse d’abord à la corvée comme régime de travail, puis au marqueur social qu’elle représente et enfin elle étudie l’économie se rattachant à la corvée.

En introduction, l’auteure remet en cause l’idée selon laquelle l’essor du capitalisme productif serait marqué par l’avènement du contrat salarial et le triomphe du travail libre, tandis que le recours au travail forcé aurait dominé l’organisation de la production dans les économies anciennes et féodales, idée faisant l’objet d’une relecture critique depuis plusieurs années. En effet, il faut tout d’abord distinguer corvée seigneuriale et corvée royale : ici c’est bien de la corvée royale, moins étudiée par l’historiographie, que ns traitons. Ce système de réquisition du travail généralisé en 1738 permit à la monarchie de faire construire et d’entretenir à moindre coût les routes. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, la question de la corvée fit l’objet d’une vive controverse qui opposa des «économistes», des philosophes, des ingénieurs et des administrateurs. Un des aspects essentiels de cette querelle portait sur les enjeux fiscaux, à savoir le remplacement de la corvée en nature par une imposition due par tous les propriétaires, sans distinction de privilèges, avant que le débat ne se déplace vers une fiscalisation de la corvée. Ce que