« Ne pas se rendre au théâtre, c’est comme faire sa toilette sans miroir »
Arthur Schopenhauer

Dans cet énoncé, Schopenhauer défend le fait de se rendre au théâtre, en lui attribuant une fonction essentielle. Il y a dans cette métaphore une forte valorisation de la représentation théâtrale ; en effet, l’auteur assimile la fréquentation du théâtre à un rituel d’hygiène quotidien, censé être accompli par tous. L’élément central de la métaphore réside dans la référence au miroir.
Du mythe de Narcisse à l’émergence de la psychanalyse, le miroir est doté d’un fort symbolisme. La confrontation à son propre reflet possède au moins deux interprétations principales. Premièrement, il est le moyen permettant de maîtriser l’image que l’on renvoie aux autres. En effet, le besoin de s’assurer de notre apparence physique fait partie intégrante de notre culture occidentale. Deuxièmement, il symbolise la réflexion, l’occasion de se confronter à l’image que l’on se fait de soi-même. Il y aurait donc deux dimensions à la métaphore du miroir : la première renvoie à l’image de l’individu en société, la deuxième relève du jugement réflexif et des valeurs morales de chacun. C’est plutôt cette deuxième dimension, l’aspect moral, qui peut être mis en relation avec le théâtre. Assister à une représentation théâtrale permettrait une réflexion comparable.
Le dispositif théâtral confronte les spectateurs à une représentation de personnages et de situations, plus ou moins directement inspirées de la vie humaine. Celui-ci peut donc être envisagé comme un miroir, dans lequel les spectateurs contemplent leur reflet, incarné sur la scène par des comédiens. Cependant, en raison de son caractère fictionnel, il opère aussi une mise à distance, permettant au spectateur de libérer son esprit de ses impuretés, faisant ainsi en quelque sorte, sa toilette morale. C’est la fonction cathartique du théâtre. Nous allons analyser ces deux dimensions, afin de voir quelle fonction Schopenhauer attribue au