Dissertations en droit
Agnès Blanco, âgée de cinq ans, est renversée et grièvement blessée par un wagonnet poussé par quatre ouvriers. Le wagonnet appartient à la manufacture des tabacs de Bordeaux, exploitée en régie par l'État. Le père de l'enfant saisit la juridiction judiciaire d'une action en dommages-intérêts contre l'État, estimé civilement responsable de la faute commise par les quatre ouvriers. Un conflit s'élève entre les juridictions judiciaire et administrative et le Tribunal des conflits est chargé de trancher.
La question est de savoir « quelle est, des deux autorités administrative et judiciaire, celle qui a compétence générale pour connaître des actions en dommages-intérêts contre l'État »[1].
Le Conseil d'État, déclaré compétent par l'arrêt Blanco, rendra un arrêt le 19 mai 1874, octroyant une rente viagère à la victime.
Cet arrêt du Tribunal des conflits est l'un des onze rendus avec la voix déterminante du Garde des Sceaux, ministre de la Justice (Jules Dufaure), pour cause de partage de voix entre les membres[2]. Certaines personnes disent que ce strict partage des voix révèle le caractère profondément politique de ce jugement dont le fondement, une interprétation a contrario et quelque peu téléologique de la loi des 16 et 24 août 1790 (cf. infra), semblerait bien mince. Ces personnes disent qu'il est donc important de situer cette décision dans son contexte politique : ainsi, le Conseil d'État, organe napoléonien, se trouve sur la sellette depuis l'abdication de Napoléon III, et il lui faut revenir sur le fondement traditionnel de sa compétence, la puissance publique, laquelle fut bien souvent synonyme d'oppression aux yeux des Républicains[réf. nécessaire]. L'opportun critère du service public lui aurait alors permis de se trouver un avenir.
Considérant essentiel de l'arrêt[modifier]
« Considérant que la responsabilité, qui peut incomber à l'État, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des