Duras Tagungsband Vortrag04
Le rôle diégétique du crime passionnel dans
Moderato cantabile et Dix heures et demie du soir en été de Marguerite Duras.
Comment raconter la passion sans recourir à des poncifs ? Par quels moyens rendre la complexité de cette partie de la vie humaine qui au fond reste inracontable? – on pourrait s’imaginer qu’avec des questions du même genre s’affrontent ou devraient s’affronter les écrivains parlant de ce sujet « usé », si j’ose dire. Les oeuvres de Marguerite Duras, qu’on peut à juste titre appeler écrivain de la passion, sont une preuve incontestable que la chose est possible : que l’écrivain dispose des moyens qui lui permettent de présenter d’une manière originale sa ou ses propres visions de l’amour. D’une manière allusive et elliptique, sans événements dramatiques ni scènes larmoyantes ou indécentes,
Marguerite Duras raconte ce qui est, comme elle l’avoue à plusieurs reprises, indicible. Sous la sobriété trompeuse se cachent de véritables drames et aventures émotionnelles qui se révèlent au lecteur indirectement, par le truchement d‘éléments apparemment insignifiants, voir redondants. Dans la présente intervention, je voudrais analyser deux histoires d’amour différentes racontées dans Moderato cantabile (1958) et Dix heures et demie du soir en été
(1960) où l’auteur exploite le même motif - le crime passionnel - qui, tout en paraîssant être un élément anodin de la diégèse, y remplit une fonction fondamentale parce qu’il change d’une manière latente mais décisive la situation initiale des personnages.
Les deux crimes, quoiqu’ayant un dénominatif commun « passionnel », se déroulent dans des circonstances et pour des motifs différents. La manière que choisit le narrateur pour les présenter change d’un récit à l’autre et cela non sans raison parce que les techniques différentes de la représentation ne mettent pas l’accent sur les mêmes aspects de l’événement. Dans Moderato, le meurtre est commis par un jeune homme qui apparemment n’a