Essai sur la Cloche de détresse de Sylvia Plath
Découvrir son moi à travers un personnage
fictif. L’imaginaire de l’auteure a trompé Sylvia Plath en dépeignant son portrait dans La cloche de détresse, et ce bien malgré elle. Devant l’incapacité de cette femme à se voir telle qu’elle est, cette œuvre est le seul regard inconscient qu’elle a porté sur elle-même.
Pour moi, Esther est en quelque sorte le double de Sylvia. L’auteure s’en servirait comme protection, mais également comme filtre, afin d’analyser sa propre folie. Cette inaptitude se reflète d’ailleurs dans l’ensemble de l’ouvrage. Esther, ou Sylvia, nie tout ce qu’elle est : l’unique moyen d’enfin agir librement et d’accomplir tout ce qu’elle désire est de le faire à travers une autre identité, comme celle d’Elly Higginbottom. Il suffit de s’attarder au nom qu’elle s’est attribuée pour comprendre davantage sa vision pessimiste, Higgin « bottom », donc « bas » en français.
La tension palpable lors de la
séance photo expose une fois de plus l’inaptitude d’Esther à se faire face. « Je ne voulais pas être photographiée, car je savais que j’allais pleurer »1. Elle est terrorisée à la simple idée de devoir se faire face en photographie. Cette peur a quelque chose de théologique, les êtres primitifs, les « sauvages », étaient effrayés par les appareils photo, croyant fermement que leur âme restait sur l’image. De plus, la photographie représente un moment figé, aussi figé que la mort : ce serait la fixer à jamais sur un bout de papier, à un moment où elle n’est pas accomplie, où le vide qui l’occupe prend toute la place à l’intérieur d’elle-même. Ce serait la mettre face à son existence vacante, la plonger dans un vertige existentiel.
Devant la question insoutenable de son avenir, la meilleure
réponse qu’elle a à offrir est la poésie. Ne sachant pourquoi elle existe, Esther ne peut pas décider de son avenir, le futur étant une notion trop abstraite alors que son présent est à peine