Familistere de guise
I / Jean-Baptiste André GODIN (1817-1888)
Né en 1817 dans la Thiérache à Esquéhéries (dans l’Aisne). Serrurier, fils d’artisan serrurier. De son tour de France, il retient essentiellement le déplorable état de la condition ouvrière : « Je voyais à nu les misères de l’ouvrier et ses besoins, et c’est au milieu de l’accablement que j’en éprouvais que, malgré mon peu de confiance en ma propre capacité, je me disais encore : si un jour je m’élève au-dessus de la condition de l’ouvrier, je chercherai les moyens de lui rendre la vie plus supportable et plus douce, et de relever le travail de son abaissement. » (Solutions sociales, 1871)
Dès lors, Godin s’intéresse à tout ce qui se pense, s’écrit, se fait ou se cherche autour de la question sociale. En 1842, il découvre dans un article du Guetteur de Saint Quentin la pensée de Charles Fourier, le socialiste utopiste, l’inventeur des phalanstères. C’est l’illumination. Mais Godin sera au moins autant un inventeur de génie qu’un ingénieur de l’expérimentation sociale. Là est son exceptionnelle singularité. Il a l’idée, proprement révolutionnaire, de substituer la fonte au fer dans la fabrication des appareils de chauffage – dont le fameux poêle Godin. En 1840, il crée une première entreprise à Esquéhéries, avec deux ouvriers. La place manquant, il s’installe ensuite à Guise, au bord de l’Oise. De 30 ouvriers, l’entreprise passe à 300, puis à 700. En 1881, ils sont 1337. Un capitaine d’industrie, doublé d’un remarquable gestionnaire, est né. Avec la prospérité de son entreprise (n°1 mondial de la production de poêles), Godin s’est donné les moyens de réaliser son serment de jeunesse. Il se distingue ainsi de tous les utopistes de son temps : « J’ai traduit mes pensées en actes et leur ai donné l’organisation et la vie avant de les exposer en théorie. Il n’est donc pas possible de dire que je suis resté dans le domaine des utopies », dit-il en 1877, devant ses