Fils de charlemagne
La chanson de Roland
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Le jour s’en va et la nuit est tombée.
Charles dort, le puissant empereur.
Il rêva qu’il était dans le grand défilé de Cize et qu’entre ses poings il tenait sa lance de frêne.
Le comte Ganelon la lui a arrachée, il l’a si violemment brandie et secouée que vers le ciel en volent les éclats.
Charles dort tant qu’il ne se réveille pas.
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À ce rêve succéda une autre vision.
Il était en France, dans sa chapelle, à Aix.
Au bras droit un féroce verrat le mordit.
Du côté de l’Ardenne il vit venir un léopard qui violemment s’attaqua à son corps même.
Du fond de la salle un vautre dévala qui courut à Charles au galop et par bonds.
En premier au verrat il trancha l’oreille droite et livra un combat furieux au léopard.
Les Français disent que c’est une grande bataille, mais ils ne savent pas lequel la gagnera.
Charles dort tant qu’il ne se réveille pas.
[...]
64
Le comte Roland est monté sur son destrier.
Vers lui s’avance son compagnon Olivier ;
Gérin y vient, et le vaillant comte Gérier, et aussi Othon et Bérenger, et aussi Astor et le vieil Anséis, et le farouche Gérard de Roussillon ; y est venu le puissant duc Gaifier.
L’archevêque dit : « J’irai, par ma tête !
– Et moi avec vous, dit le comte Gautier ; je suis l’homme de Roland, je ne dois pas lui manquer. »
À eux tous ils choisissent vingt mille chevaliers.
[...]
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Charlemagne ne peut s’empêcher de pleurer.
Cent mille Français sur lui s’attendrissent, et pour Roland ils redoutent le pire.
Le perfide Ganelon l’a trahi : du roi païen il a reçu de riches dons, or et argent, draps de soie et brocarts, mulets, chevaux et chameaux et lions.
Marsile convoque les barons d’Espagne, les comtes, vicomtes, ducs et almaçours, les émirs et les fils des comtors.
Il en rassemble quatre cent mille en trois jours.
Dans Saragosse il fait battre tambour.
On dresse Mahomet sur la