Ghestin La notion de contrat S1 TD CIVIL
Recueil Dalloz 1990 p.147
La notion de contrat
(1)
Jacques Ghestin
Il ne sera directement question ni de la fonction, ni du régime du contrat (2), mais seulement de la notion de contrat, c'est-à-dire du point de savoir ce que c'est qu'un contrat et ce qui est contrat.
On a montré combien il était difficile de donner une définition commune du contrat, même en se limitant à quelques systèmes juridiques, tels que les droits anglo-américains, allemands, italiens et français. Certains considèrent même qu'une telle définition est impossible (3) ou que, du moins, le contrat ne peut recevoir qu'une définition fonctionnelle dont le sens sera variable en fonction du contexte (4).
Si le contrat a pu être qualifié de « pilier » du droit (5), son existence même, en tant que concept suffisamment identifiable pour être de quelque utilité, a été contestée (6). Un critère du contrat suppose un élément unique de reconnaissance ou, en tout cas, des éléments peu nombreux, qui devront être retrouvés dans tous les actes auxquels cette qualification sera attribuée.
L'anthropologie juridique donne à penser cependant que le contrat, les relations contractuelles, sont bien de l'essence des relations humaines (7).
On a montré (8) que dans les sociétés semi-complexes et, a fortiori, dans les sociétés complexes, comme nos propres sociétés, la soumission à des règles juridiques externes aux parties et sanctionnées par des organes judiciaires permet la réunion des conditions minimum permettant d'identifier des relations contractuelles : des sujets (les parties), un objet
(prestation ou bien) et une sanction judiciaire.
A cet égard on observera que s'il peut éventuellement y avoir des contrats « sans loi », encore que cette opinion soit contestée, cela signifie seulement qu'un contrat pourrait n'être soumis à aucune loi étatique et n'obéir qu'à celle des marchands, la lex mercatoria. Mais en tout cas il ne peut y avoir de contrat sans droit ni sans juge (9).
L'évolution dans