Grande peur de 1789 et complot aristocratique
Originaire du nord de la France (1874), Georges Lefebvre, boursier, fils d'un employé de commerce, franchit tous les échelons de la carrière universitaire. Agrégé d'histoire et de géographie en 1898, il enseigne dans le secondaire (Cherbourg, Tourcoing, Lille, Paris) jusqu’en 1924.
Militant de gauche décidé, guesdiste dans sa jeunesse, socialiste, ses liens avec Jean Jaurès ne sont pas étrangers à son orientation intellectuelle vers la Révolution : en effet, élève à Lille du médiéviste Charles Petit-Dutaillis, Lefebvre abandonne très vite la période médiévale pour la période révolutionnaire. Historien social, mais surtout historien dans la cité, Lefebvre fut lié dans sa vie comme dans ses recherches par un sentiment de solidarité fraternelle avec les hommes qui luttent pour la liberté. Cette vision engagée a certes fragilisé une partie de son œuvre. Toutefois, sa vaste érudition et sa foncière honnêteté ont permis à ses travaux de franchir sans difficultés le cap de la postérité.
La thèse qu'il présente en 1924, à 50 ans, alors qu'il vient d'être nommé à la faculté de Clermont-Ferrand, Les Paysans du Nord pendant la Révolution, est saluée par les spécialistes (Aulard, Mathiez, Pirenne), tant il a su à la fois dépouiller de très nombreuses sources statistiques mais aussi renouveler l'approche de cette période pourtant très étudiée. De plus, sa monographie s'inscrit dans les débuts de l’histoire économique et sociale au sein des études historiques en France.
Lefebvre est, certes, influencé par la lecture de Marx qui le pousse à utiliser le paradigme de la lutte des classes pour analyser les rapports entre le peuple et les privilégiés. Pour autant, c'est un historien, non un polémiste, qui aborde la discipline dans toute sa complexité, en envisageant dans ses synthèses la conjonction des facteurs sociaux, économiques et politiques.
Nommé à Strasbourg en 1928, Lefebvre y rejoint les futurs fondateurs des Annales. Ses relations