Guagliò Petite frappe me collait depuis ce jour où le cousin m’initia. Une journée estivale comme les autres, un ramadan comme les autres aussi, nous flânions dans les rues pour tuer le temps jusqu’à la rupture du jeûne. La part de Chabbakya, gâteau au miel, qui était pour nous le principal attrait du repas du soir loin devant l’incontournable soupe harira, suffisait peu à nos petits ventres gourmands. Les ventres étaient nombreux, celui de l’oncle les valait tous et ne se privait pas de se servir copieusement. En premier. Un petit moment d’inattention du boulanger et nos mains de chiper les belles rondes à croquer si provocantes en faisant la devanture de son commerce saisonnier car d’habitude il vendait des beignets spongieux, gros et ronds avec un trou au milieu. Même les abeilles qui tournoyaient autour des pyramides alléchantes de gâteaux suivirent le gracieux mouvement. Une bonne partie de la pyramide, qui subit notre assaut, dégringola alors que nos jambes volèrent droit devant sous les injures nous maudissant et nous préconisant un destin funeste à cause de nos méfaits en ce mois sacré. Ce jour-là, j’ai compris que semer les hommes, était une question de survie. Le cousin avait l’habitude de voler à l’étalage et me prit sous son aile pour faire des petits coups. Il avait des projets pour devenir caïd du quartier et pressentait qu’il fallait commencer tôt et que la famille était incontournable. Pour parfaire notre apprentissage dans la mauvaise voie, nous allions beaucoup au cinéma pour voir des films américains sur la mafia et ceux de Hong-Kong pour la virtuosité des combats. Nous cherchions évidemment à tromper le gardien pour entrer dans la salle sans payer. Nous devions nous faufiler entre les jambes adultes composant la file d’attente sans qu’il s’en aperçoive. Comme souvent nous étions une petite dizaine tentée par le cinéma des bandits et des gangsters, l’entreprise était hasardeuse. Dans l’espace exigu entre la caisse, la porte de la salle et la rue,