Hiroshima et nagasaki
Avec cet Èditorial de l’Ècrivain et rÈsistant Albert Camus (1913-1960) publiÈ, deux jours ‡ peine aprËs le largage d’une bombe A amÈricaine sur Hiroshima, dans le journal Combat, c’est une voix qui dÈtonne dans le concert de louanges abusivement adressÈ aux AmÈricains. C’est un article fort juste sur ´†l’ensauvagement du monde†ª - pour reprendre une formule de la philosophe ThÈrËse Delpech- qui donne quelque Ècho aux propos tenus quelques jours auparavant (aprËs l’explosion expÈrimentale du 16 juillet 1945) par Kenneth Bainbridge (1904-1996), un des savants du Projet Manhattan qui a dÈclarÈ textuellement ´†Maintenant nous sommes tous des fils de pute†ª. Pourtant, s’il perÁoit bien la portÈe morale de l’action accomplie, A. Camus n’Èchappe pas ‡ l’air du temps†: il formule l’hypothËse que cette bombe peut entraÓner la fin de la guerre en Asie orientale et qu’elle peut, paradoxalement, Ítre un mal pour un bien en faisant comprendre qu’il est plus que temps de construire un nouvel ordre mondial si on ne veut pas que l’humanitÈ courre ‡ sa perte.
Le bombardement d’Hiroshima a-t-il mis fin ‡ la guerre†?
La phrase de Camus, ´†Si les Japonais capitulent…†ª pourrait laisser penser que le bombardement d’Hiroshima a ÈtÈ dÈcisif et a entraÓnÈ la capitulation des Japonais. En rÈalitÈ on sait qu’il n’en est rien. Ce mythe de l’utilitÈ d’Hiroshima est nÈ dans l’administration Truman qui a laissÈ courir le bruit que ce bombardement aurait ÈpargnÈ la mort de 30†000 soldats amÈricains si la voie de l’invasion classique avait ÈtÈ choisie par l’administration amÈricaine. Le seul choix que le PrÈsident amÈricain a d° faire, c’est le choix de la ville ‡ bombarder†: il a d° arbitrer entre Kyoto ancienne capitale du Japon ou une ville plus modeste inconnue ‡ l’ouest. Mais le principal destinataire de ce bombardement ce n’Ètaient pas les Japonais qui en furent les victimes mais l’alliÈ soviÈtique. De fait, l’administration amÈricaine savait trËs