Il fait trop chaud
Nous sommes tous là à ce mauvais rendez-vous que tu nous a donné.
Voilà cinq longues années que tu as été obligé de quitter la maison familiale pour une raison extrémiste qu’en cachait bien d’autres, plus intimes, plus établies que celle pour laquelle ces dernières années tu t’es obligé à dormir à la belle étoile, ou chez quelque ami qui te prêtait dans son « bouge », un mauvaise paillasse, un godet de gros rouge, la chaleur de son amitié. Te voyant rejeté par l’épouse que tu aimais encore, tu t’es cru rejeté de chacune des personnes qui gravitait autour de vous deux... Sais-tu combien il était dur, en ces heures, de croiser le goût de ton regard quand celui-ci croisait le mien : il fuyait, il était chargé de honte de la représentation que tu supposais me donner de ta personne. N’auras-tu donc jamais compris le profond respect que je te portais, même en étant devenu ce que tu étais.. ? Vois-tu, tout homme à un cœur, une âme, et ce n’est pas comme il se montre, comme il est devenu qui doit le perdre aux yeux de ceux qui ont encore envie de l’aimer... L’Amour est naturel, mais se sert aussi des envies d’aimer...
Tu n’as eu qu’une fille.. J’étais ton fils... Bien plus que ne l’était mon frère que tu as aussi élevé mais qui, avec six ans d’avance sur moi, n’a jamais pu sentir la même fièvre du père que tu as été envers moi... Tu as pris le train de sa vie à la gare de ses neufs ans ou dix ans, alors que je lançais moi-même ma motrice avec un retard de six ans sur lui... Des deux trains, tu as été le seul vrai conducteur...le sais-tu ? Cathy est sortie de son usine lors de mon treizième rodage. Grande différence d’âge entraînant des différences de points de vue.. C’est peut-être la seule explication que je peux apporter au déroulement de cette soirée qui fera date dans ma vie, comme étant celle de ma naissance véritable, en rabaissant ma fierté au profit de la vérité de la vie. A dix-huit ans, du haut de ce grand et bel âge,