« Le voyage d’un quatuor »

Le roman « Lame de fond » par Linda Lê, parut en 2012 retrace l’histoire originale d’un correcteur littéraire: Van, percuté par l’Austin de sa femme, la conductrice, lorsqu’il sortait d’une soirée en compagnie de sa maîtresse. «Je n’ai jamais été bavard de mon vivant. Maintenant que je suis dans un cercueil, j’ai toute latitude de soliloquer. » Le roman nous est d’abord raconté par le défunt protagoniste lorsqu’il se trouve « six pieds sous terre », puis s’ajoute les deux membres de sa famille ainsi que celle dont il a caché l’existence. La polyphonie de ce roman est formée par les le quatuor des voix de Van, père vietnamien, mari et amant, Laure, adolescente de 17 ans indépendante, Lou, femme et bourreau de son mari et Ulma, maîtresse eurasienne du défunt au passé des plus compliqués. Chacun exprime à son tour, au cours de la journée suivant l’homicide, des anecdotes, des détails sur la vie du trépassé et sur sa propre vie. Ces personnages aussi intrigants que discordants mènent une quête sur la vérité du séisme qui es accable, chacun étant conscient de détails inconnus pour d’autre. Chaque point de vue collabore au fin mot de l’histoire, au pourquoi du comment. Linda Lê apporte beaucoup de questionnement à travers ce récit : la mort bien sur, la recherche de l’appartenance à un pays, les répercutions des troubles familiaux, l’importance de la vérité. Les premières pages du roman, garnies d’un vocabulaire ardu digne d’un expert littéraire freine dans l’envie de continuer les deux cent prochaines pages, mais sans s’en rendre compte, au fil de l’histoire, l’aventure des protagonistes est palpitante, captivante, ensorcelante et arriver à s’en détacher est pratiquement impossible. Les ressentis sont décrits d’une façon si prenante, que l’on se fond directement dans la peau des personnages Cet effet si réaliste n’est guerre surprenant, l’auteur s’inspirant directement de sa propre histoire. En effet Linda Lê a elle-même fuit la guerre