Iphigénie
Faire se confronter des textes de théâtre peu montés, questionner notre rapport au public, voici ce qui est à la base de notre recherche. Le projet Iphigénie découle de nos deux précédents spectacles : La Raison gouverne le monde (cinq pièces de cinq auteurs différents), et Massacre à Paris de Christopher Marlowe (cinq versions de la même mise en scène, avec le même groupe d’acteurs, chaque fois distribués dans des rôles différents ). Cette fois, il s’agit de la même histoire racontée par deux auteurs, à deux époques différentes.
Pour Racine, l’histoire d’Iphigénie s’achève avec la fin de l’unique pièce qu’il lui consacre, mais pour Euripide, cette histoire s’inscrit dans la grande saga des Atrides. Les anciens récits racontent qu’Iphigénie fut attirée à Aulis sous le prétexte d’un mariage avec Achille et que Clytemnestre célébrait déjà l’hyménée de sa fille tandis qu’Agamemnon était en train de l’égorger. Euripide reprend l’histoire et la modifie : Clytemnestre conduit sa fille à Aulis, mais Iphigénie décide elle-même d’aller au sacrifice et au dernier moment Artémis lui substitue une biche et la transporte en Tauride.
Racine reprend à son tour le récit mythique et le modifie dans un souci de « vraisemblance » et de « bienséance », nous explique-il dans sa préface à l’oeuvre. Il supprime Ménélas au profit d’Ulysse et son Achille est épris d’Iphigénie. Il ajoute aussi une intrigue amoureuse et un personnage supplémentaire avec Eriphile, captive d’Achille et folle amoureuse de lui. Biche sacrifiée, c’est elle qui sera égorgée. Racine complexifie les relations, modernise les situations. La conception du tragique est très différente chez les deux auteurs. Racine pourrait même sembler plus « tragique » qu’Euripide car le grand tragique grec peut se permettre une intrusion du burlesque que la règle de la bienséance interdit à Racine.
Nous jouerons les textes dans leur intégralité, y compris les stasima (les parties chantées par le