Je plains le temps de ma jeunesse

967 mots 4 pages
François Villon
« Je plains le temps de ma jeunesse... »

François Villon

Je plains le temps de ma jeunesse,
Auquel j’ai plus qu’autre gallé
Jusqu’à l’entrée de vieillesse,
Qui son partement m’a celé.
Il ne s’en est à pied allé,
N’à cheval ; hélas ! comment donc ?
Soudainement s’en est volé,
Et ne m’a laissé quelque don.

Allé s’en est, et je demeure
Pauvre de sens et de savoir,
Triste, failli, plus noir que meure,
Qui n’ai ni cens, rente, n’avoir ;
Des miens le moindre, je dis voir,
De me désavouer s’avance,
Oubliant naturel devoir,
Par faute d’un peu de chevance.

Si ne crains avoir dépendu
Par friander ni par lécher ;
Par trop aimer n’ai rien vendu
Qu’amis me puissent reprocher,
Au moins qui leur coûte moult cher.
Je le dis et ne crois médire ;
De ce me puis-je revancher :
Qui n’a méfait ne le doit dire.

Bien est verté que j’ai aimé
Et aimeraie volontiers ;
Mais triste cœur, ventre affamé
Qui n’est rassasié au tiers
M’ôte des amoureux sentiers.
Au fort, quelqu’un s’en récompense
Qui est rempli sur les chantiers !
Car la danse vient de la panse.

Hé ! Dieu, si j’eusse étudié
Au temps de ma jeunesse folle
Et à bonnes mœurs dédié,
J’eusse maison et couche molle !
Mais quoi ? Je fuyaie l’école,
Comme fait le mauvais enfant.
En écrivant cette parole,
À peu que le cœur ne me fend.

Le dit du sage trop lui fis
Favorable (bien en puis mais !)
Qui dit : « Éjouis-toi, mon fils,
En ton adolescence » ; mais
Ailleurs sert bien d’un autre mes,
Car « Jeunesse et adolescence »
C’est son parler, ni moins ni mais,
« Ne sont qu’abus et ignorance. »

Mes jours s’en sont allés errant
Comme, dit Job, d’une touaille
Font les filets, quand tisserand
En son poing tient ardente paille :
Lors s’il y a nul bout qui saille,
Soudainement il le ravit.
Si ne crains plus que rien m’assaille,
Car à la mort tout s’assouvit.

Où sont les gracieux galants
Que je suivais au temps jadis,
Si bien chantants, si bien parlants,
Si

en relation

  • Bulah bulah
    2859 mots | 12 pages
  • Fiche e4
    868 mots | 4 pages
  • Le clocher
    1384 mots | 6 pages
  • Ecriture d'invention. requisitoire contre l'esclavage.
    1170 mots | 5 pages
  • Fiction non terminée
    1190 mots | 5 pages
  • Frida kalho
    440 mots | 2 pages
  • Aïda
    865 mots | 4 pages
  • Le rouge et le noir
    427 mots | 2 pages
  • Casanova
    977 mots | 4 pages
  • explication Minerve ou de la sagesse
    1591 mots | 7 pages
  • Analyse relationnelle
    2452 mots | 10 pages
  • Dm d'histoire de 1ére
    422 mots | 2 pages
  • Philo
    1122 mots | 5 pages
  • Ifsi
    492 mots | 2 pages
  • Anthologie francais
    871 mots | 4 pages