jujuj
Automne 2005
Annonce
La conception la plus courante du rapport de la pensée à son expression prend la forme d’une histoire en deux étapes : d’abord on réfléchit, en sa tête ou son esprit, et ensuite on traduit ses pensées dans le langage. Le discours est cette traduction qui permet au lecteur ou à l’auditeur de reconstituer les pensées de l’auteur. Une telle explication rend bien compte, assez grossièrement, de la plupart des discours académiques. Mais les philosophes eux-mêmes font bien autre chose dans leurs discours, tout particulièrement lorsqu’ils attribuent à la philosophie une certaine efficacité pratique, morale ou politique. Il s’agit alors non pas de transmettre certaines connaissances, mais de modifier la manière même de percevoir et d’agir de ceux auxquels on s’adresse. Dans ces conditions, le discours philosophique ne doit donc pas avoir comme seule puissance celle de transmettre des connaissances, mais il doit mettre en jeu également d’autres puissances, moins étudiées, de transformer le monde de ses destinataires. Dans un précédent séminaire, nous avions étudié les problèmes que pose la philosophie entendue comme impliquant une transformation de soi. Maintenant, nous aborderons ce genre de problèmes, non plus à partir du point de vue de celui qui se modifie, mais à partir de celui des possibilités d’opérer cette modification par le discours, considéré comme l’instrument premier du philosophe dans sa tentative d’action sur le monde. Ce problème, bien des philosophes se le sont posé, même si on n’y est pas souvent très attentif. On le voit abordé par Platon, Épicure, Sextus, Sénèque ou Marc-Aurèle, par Montaigne, Descartes, Hobbes, Spinoza, Hume, Kierkegaard, Nietzsche ou Wittgenstein, parmi d’autres. Nous pourrons amorcer nos réflexions à partir des manières de poser le problème et des solutions qu’on trouve chez quelques philosophes dans certaines de leurs œuvres typiques à cet égard.
Lectures :