La liberté prise par l’artiste à l’égard du réel « est celle que l’écrivain conquiert par rapport au tableau dont il rend compte »
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Baudelaire comme beaucoup d’écrivains et d’artistes de son époque se sont intéressés à la question de l’imitation dans l’art. Ce dernier déclare dans le Salon de 1859 « et cette doctrine, ennemie de l’art, prétendait être appliquée non seulement à la peinture, mais à tous les arts, même au roman, même à la poésie ». Baudelaire s’oppose ici à la fâcheuse tendance qu’ont les artistes de manière générale à copier la Nature. Dans ce débat sur la représentation, un critique contemporain affirme que la liberté prise par l’artiste à l’égard du réel « est celle que l’écrivain conquiert par rapport au tableau dont il rend compte ». Il exploite ici la question non seulement de la mimésis mais également celle de l’ekphrasis en établissant une analogie entre ces deux « techniques ». La première relève de l’artiste (le peintre par exemple imite le réel pour produire ce que l’on pourrait appeler une seconde présentation du monde, c'est-à-dire une représentation) tandis que la deuxième relève de l’écrivain (il fait naître l’image absente par le langage). Ainsi, le critique compare le travail de l’artiste et de l’écrivain en montrant qu’ils sont tous deux caractérisés par une liberté à l’égard de leur objet. Cependant il s’agit bien d’une analogie et donc d’une ressemblance partielle entre l’artiste qui imite et l’écrivain qui rend compte de cette imitation. Ce qui diffère est le rapport qu’entretient l’auteur avec cette dite liberté : pour l’artiste elle est prise et donc saisie, acquise en quelque sorte tandis que pour l’écrivain elle est une conquête et donc une lutte. Dans le premier cas la liberté est la condition à la réalisation et dans le deuxième cas elle serait davantage la finalité du travail de l’écrivain. Cette différence est essentielle ici car elle nous permet d’établir un rapport non seulement entre les différents arts mais également entre leurs créateurs. Parler de liberté c’est évoquer un affranchissement et une distanciation à l’égard de l’objet décrit. C’est