La mise en scène du lecteur et le dispositif dialogique du moi dans enfance, de nathalie sarraute
La mise en scène du lecteur et le dispositif dialogique du moi dans Enfance, de Nathalie Sarraute
« Je n’aime pas l’autobiographie. Je n’ai aucune confiance dans les autobiographies, parce qu’on s’y décrit toujours sous un jour…, on veut se montrer sous un certain jour. Et puis, c’est toujours très partial – enfin, moi je n’y crois jamais. Ce qui m’intéresse quand je lis les vraies autobiographies, c’est de voir « ah bon c’est comme ça qu’il voulait qu’on le voie ». ».
Partant de cette critique réalisée par N. Sarraute à l’égard de l’autobiographie, la question qui se pose aux lecteurs lors de la lecture d’Enfance, unique autobiographie de N. Sarraute, met à jour un paradoxe : comment l’écrivaine a-t-elle pu concilier son envie de raconter ses souvenirs d’enfance dans une autobiographie avec son rejet du genre autobiographique classique, tel qu’il a été mis en place par Rousseau ? Comment Enfance, qualifié de manière récurrente par les critiques d’autobiographie d’originale, peut-elle être replacée parmi l’histoire du genre autobiographique au XXe siècle ? Et Enfin, comment le lecteur appréhende-t-il cette œuvre, représentative du projet littéraire de N. Sarraute, visant à rendre compte des « tropismes » de l’auteur ?
Lors de l’écriture de son autobiographie, N. Sarraute va choisir de mettre en place un certain nombre de stratégies lui permettant de rester fidèle aux critiques qu’elle adresse à l’autobiographie classique et d’éviter les pièges dans lesquels tant d’autobiographes sont tombés. Ces stratégies prennent forme tout au long de son œuvre et permettent à N. Sarraute de concevoir une « Nouvelle Autobiographie », bien loin des conventions mises en place par Rousseau et théorisées par Lejeune.
Ce refus des conventions est visible dès la première page d’Enfance, où le traditionnel pacte autobiographique se voit remodelé par l’auteure. Ce dernier est réduit à une seule phrase résumant le projet