Dissertation d'Histoire
La Saint-Barthélémy, un évènement-rupture ?

Dans son essai La Saint-Barthélémy, les mystères d'un crime d'Etat, Arlette Jouanna évoque une anecdote tout à fait étrange. Elle raconte l'histoire d'un jeune protestant, Geoffroy, qui, ayant parvenu à fuir le massacre, écrit à Catherine de Médicis. Le motif qui l'a poussé à écrire ne manque pas de surprendre : il voulait se justifier de son départ précipité au matin du 24 Août et de ne pas avoir eu le temps de "bayser très-humblement les mayns" de leur majestés ! Cette anecdote prouve que dans les quelques jours qui suivent le drame, les protestants ne perçoivent pas le pouvoir royal comme responsable du massacre et sont tout à fait désarçonné par un tel évènement dont ils ne comprennent pas les enjeux. Ceci est compréhensible puisque depuis l'accession au pouvoir de Catherine de Médicis, le pouvoir royal s'est engagé dans une marche pour la paix dans le royaume que le massacre du 24 Août vient contredire. La Saint-Barthélémy est perçue avant tout comme un pogrom populaire pérpétré par la population parisienne catholique le 24 Août 1572. Cependant la thèse d'Arlette Jouanna selon laquelle il existe deux Saint-Barthélémy est à retenir pour l'analyse. En effet l'historienne dissocie la proscription et le pogrom populaire qui ne possèdent pas en effet ni les mêmes enjeux, ni les mêmes responsables. Il s'agira de voir en quoi ces deux Saint-Barthélémy s'inscrivent ou non dans le siècle humaniste. Le concept de rupture suppose en effet que l'évènement soit une parenthèse tout à fait contraire au siècle et qui apparait comme une interruption soudaine et inatendue de la politique de concorde menée depuis l'édit d'Amboise de 1560. Une rupture s'effectue en lien avec un contexte qu'est celui de la régence de Catherine de Médicis à celui de son fils Charles IX. Dans quelles mesure les deux Saint-Barthélémy que sont la proscription des huguenots de guerre et le pogrom populaire s'inscrivent-t-ils