La science politique
Vieille de près de vingt-cinq siècles, la science politique devrait offrir aujourd'hui des traits propres, aisément discernables et définissables, faciles à présenter en termes clairs et précis. Or, il n'en est rien. Si l'introduction, il y a vingt-cinq ans, de la science politique dans l'enseignement universitaire de la plupart des pays d'Europe a marqué « la fin d'une extraordinaire carence », elle n'a pas été, comme on aurait pu le penser, la fin des controverses.
Déclarée « introuvable », considérée comme une innovation, voire tenue pour une découverte, la science politique, devenue « la science à la mode », a vu son objet propre discuté et même nié ; d'autre part, sa nature « scientifique » a été admise dans la seule mesure où elle se montrait susceptible d'être une connaissance empirique et positive.
Après un quart de siècle, en dépit de leurs prémisses (ou de leurs préjugés), tous ceux qui se sont consacrés à la science politique ont eu à peu près le même champ d'exploration et d'exposition ; cette constatation a présentement apaisé les polémiques, mais la définition de la science politique n'en reste pas moins en débat. Les lignes qui suivent recueilleront les plus retentissants échos de ces affirmations discordantes. On s'efforcera cependant d'en dégager des propositions positives, reflet moins d'une vue personnelle des choses que d'une tradition continuée et confortée. On ne se dissimulera cependant pas que définir, c'est toujours, en quelque manière, s'approprier.
1. Existence et indépendance de la science politique
• Une juxtaposition de sciences diversifiées
Aux yeux de beaucoup, dont l'attitude prolonge celle qui dominait pendant la seconde moitié du xixe siècle et le premier quart du xxe, il n'existe pas une science politique, mais des sciences politiques multiples et distinctes. Politique n'est pas un substantif, mais une épithète, selon les cas, de la philosophie, de l'économie, du droit, de l'histoire, de la géographie,