La thébaïde texte complet
Tragédie en 5 actes
Adresse
A Monseigneur
Le duc de Saint-Aignan
Pair de France.
MONSEIGNEUR,
Je vous présente un ouvrage qui n’a peut-être rien de considérable que l’honneur de vous avoir plu. Mais véritablement cet honneur est quelque chose de si grand pour moi que, quand ma pièce ne m’aurait produit que cet avantage, je pourrais dire que son succès aurait passé mes espérances. Et que pouvais-je espérer de plus glorieux que l’approbation d’une personne qui sait donner aux choses un juste prix, et qui est lui-même l’admiration de tout le monde ? Aussi, MONSEIGNEUR, si la Thébaïde a reçu quelques applaudissements, c’est sans doute qu’on n’a pas osé démentir le jugement que vous avez donné en sa faveur ; et il semble que vous lui ayez communiqué ce don de plaire qui accompagne toutes vos actions. J’espère qu’étant dépouillée des ornements du théâtre, vous ne laisserez pas de la regarder encore favorablement. Si cela est, quelques ennemis qu’elle puisse avoir, je n’appréhende rien pour elle, puisqu’elle sera assurée d’un protecteur que le nombre des ennemis n’a pas accoutumé d’ébranler. On sait, MONSEIGNEUR, que si vous avez une parfaite connaissance des belles choses, vous n’entreprenez pas les grandes avec un courage moins élevé, et que vous avez réuni en vous ces deux excellentes qualités qui ont fait séparément tant de grands hommes. Mais je dois craindre que mes louanges ne vous soient aussi importunes que les vôtres m’ont été avantageuses : aussi bien, je ne vous dirais que des choses qui sont connues de tout le monde, et que vous seul voulez ignorer. Il suffit que vous me permettiez de vous dire, avec un profond respect, que je suis,
MONSEIGNEUR,
Votre très humble et très obéissant serviteur,
RACINE.
Préface
Le lecteur me permettra de lui demander un peu plus d’indulgence pour cette pièce que pour les autres qui la suivent ; j’étais fort jeune quand je la fis. Quelques vers que j’avais