Le bal du compte d'orgel incipit
En 1924 paraissait à titre posthume le deuxième roman du jeune romancier Raymond Radiguet, « le bal du compte d’Orgel », pastiche modernisé de la Princesse de Clèves.
La trame de l’intrigue de ce court roman s’attache à un trio amoureux.
Les lieux de l’action entre Champigny et Paris dans l’aristocratie du faubourg Saint-Germain rappelle le cadre aristocratique de « La Princesse de Clèves » et de Mademoiselle De Chartre, héroïne tragique, déchirée entre la raison et la passion, qui sert de modèle à Mahaut. L’extrait proposé se situe au début du roman, il en constitue l’incipit. Dans quelles mesures ce début annonce- t’il les enjeux de cette réécriture ? C’est à partir d’un nouveau type de contrat de lecture et de la généalogie de la maison des Grimoard que le lecteur découvrira la nouvelle Princesse de Clèves.
I. Un contrat de lecture
Le roman s’ouvre sur un dialogue entre le narrateur et ses lecteurs notamment sur une interrogation « sont-ils surannés ? ». Le narrateur est extérieur au récit, il est omniscient, mais intervient à partir du pronom personnel « nous ». Comme l’héroïne de Madame de La fayette, les choix de la comtesse susciteront le débat et provoqueront l’incompréhension, les adjectifs « parrainé » et « incroyable » expriment des jugements de valeurs sur la conduite de la protagonistes, jugements qui pourraient être contradictoires comme le montre l’antithèse « trop honnête trop facile », preuve de complexité du personnage. Le narrateur anticipe donc la réception de son œuvre et prépare le goût de ses lectrices qui se porteraient plutôt vers des romans sentimentaux, ou les héroïnes succomberaient à la passion, peut-être le romancier fait-il référence à son précédent roman « Le diable au corps ». Son projet est pourtant autre, il cherche à sonder les eaux troubles de l’inconscient, et renouveler ainsi le genre du roman d’analyse sentimentale.