Le feu s'était éteint
Ma plus douce espérance est de perdre l'espoir.
Pierre Corneille, Le Cid.
Le feu s'était éteint. Seules quelques braises persistaient, parcelles de brûlures qui me ramenaient périodiquement au bon souvenir de mes douleurs anciennes , rougeoiement lancinant qui venait sans cesse tourmenter ma mémoire. Je savais qu'il n'y avais plus rien à attendre, sinon que ça s'arrête enfin, cette agonie qui n'en finissait pas, mais je me refusais encore à sentir ce goût de cendre si particulier aux amours passées.
Je ne pouvais oublier. Tout était prétexte à réminiscences devant cette constatation, désespérée et désespérante, qu'il ne me restait plus rien maintenant qu'il avais tout emporté avec lui : le meilleure de ma vie était derrière moi puisque je lui avais laissé le meilleur de moi-même. Tout au moins est-ce ainsi que je pensais.
Pourtant je voulais oublier. Je me répétais sans cesse que c'était fini, bien fini; quand bien même serait-il revenu ce serait moi qui n'aurais pas voulu de lui. Mais il me fallait accepter l'inacceptable, qui était d'avoir aimé qui ne m'avait pas aimé, et concevoir l'inconcevable, savoir que ce qu'il m'avait laissée espérer, lui même, il n'y avait jamais cru. J'avais espéré que soit toujours mieux ce qui, il fait le reconnaître, n'avais jamais été bien; car les instants de bonheur, si je les avais beaucoup imaginés, je les avais rarement vécus. Et il m'était plus difficile encore de faire le deuil de ce qui n'avait pas été que le deuil de ce qui avait été. Comment supporter d'avoir si longtemps attendu ce que je n'avais jamais eu ? Comment accepter de perdre ce qu'il s'était toujours refusé à me donner ?
Comment oublier les promesses même si l'on accepte l'amour qui n'est plus ? Comment pardonner la faiblesse d'y avoir cru même si l'on y à été autorisé par celui-là même qui vous a trahi ? Il m'avait pris, en même temps que ma vie, le plus beau de mes rêves : ce que j'avais espéré était si parfait, comment