Le mal

2208 mots 9 pages
LE SOMMEIL DE L’INNOCENCE

Macbeth dans Macbeth acbeth, c’est la faim », écrit Victor Hugo dans son William Shakespeare. Définition étrange pour un personnage qui ne cessera de dire, tout le long de la pièce, son impuissance à satisfaire et presque à éprouver les appétits les plus humbles. D’innombrables scènes ou monologues nous font assister à sa frustration de se voir coupé de tous les festins de la vie. Du festin des nourritures et des vins, tout d’abord : jamais Macbeth ne parvient à toucher au moindre mets ni à porter à ses lèvres la coupe qu’il lève pendant le banquet. Du festin de l’érotisme : à l’opposé de tant de méchants dont la luxure est le signe certain d’un appétit vicié par la démesure — Aaron, le maure lubrique de Titus Andronicus ; Edmond, amant des deux filles du Roi Lear ; Claudius, qui usurpe le lit du père d’Hamlet aussi bien que son trône —, notre personnage ne prononce pas un seul mot de volupté ou de désir, et même dans la complicité qui le lie à sa femme aucune sensualité ne transparaît. Du sommeil, enfin, ce festin des festins, « chief nourisher in life’s feast »1. L’incarnation du mal que propose ici Shakespeare ne coïncide pas avec celle du tyran habituel des drames d’usurpation : ce n’est pas l’assouvissement d’une ambition trop vaste et toujours recommencée qui conduit Macbeth de crime en crime. Tout se passe, au contraire, comme si les

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M

voluptés du pouvoir qu’il cherche à conquérir étaient pour lui sans le moindre attrait : à aucun moment il ne nous paraît convoitant les jouissances de la domination, de la possession, de la violence ou du luxe. S’il se jette dans les plus épouvantables crimes, s’il fait passer au fil de son épée roi, amis, femmes et enfants, s’il est prêt à faire crouler l’ordre du monde, c’est dans l’espoir, dirait-on, de pouvoir simplement manger, dormir, s’asseoir… En dépit de similitudes superficielles, le personnage de Macbeth diffère considérablement d’autres méchants shakespeariens, et en

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