Le néant
C'est un homme irrémédiablement absent (A) et le poète éprouve les souffrances de celui qui meurt (B).
A) Un homme irrémédiablement absent
Le beau-père est l'homme qui se trouve à « l'angle de la chambre » (p. 9). Voilà tout un paradoxe pour un homme qui n'est plus. Cette présence de l'homme mort est en outre menaçante comme en témoignent les brutales exhortations : « Qu'il se tienne », « Qu'il mesure », « Que sa droiture garde ». En réalité, ces demandes ne sont que pure façade car tout dialogue avec le mort est vain. D'ailleurs, lorsqu'est évoqué « le maître », la distance est mise en exergue : « Lorsque le maître lui-même / si vite est emmené si loin » (p. 12). C'est un être dorénavant « hors de toute distance », « entraîné hors des mesures » (p. 17). Surtout, « la terre qui nous portait » (p. 15) n'est plus qu'une exclusivité du poète, le défunt étant ailleurs. Ce qui les sépare est si vaste que le poème qui l'évoque est entre parenthèses (p. 18). La parole ne peut même plus lier ceux qui jadis étaient si proches : « Il n'entend presque plus. / Hélerons-nous cet étranger s'il a oublié / notre langue, / s'il ne s'arrête plus pour écouter ? » (p. 19).
Mais celui qui était si cher au poète peut enfin s'exprimer une fois la page de sa mort tournée : « Qui m'aidera ? » (p. 20), « qui serait jour et nuit autour de moi comme un manteau / ne pourrait rien contre ce feu, contre ce froid » (p. 20). Personne ne peut le soutenir et les conditionnels le précisent. Aussi, toute vision du disparu est impossible, il n'est plus possible non plus de lui parler, seule une dernière parole lui est adressée à la fin du recueil Leçons : « Toi cependant, / ou tout à fait effacé [...] » (p. 33).
B) La difficulté d'admettre la déchirure
Mais pour que cet effacement soit réalisé faut-il au préalable que le poète admette la mort, il faut qu'il l'exprime clairement, qu'il en peigne la souffrance et surtout qu'il la subisse. Voilà le défi qui lui est