Le rationalisme moderne
L'attitude intellectuelle visant à placer la raison et les procédures rationnelles comme sources de la connaissance remonte à la Grèce antique, lorsque sous le nom de logos (qui signifie à l'origine discours), elle se détache de la pensée mythique et, à partir des sciences, donne naissance à la philosophie.
Platon ne voit dans la sensibilité qu'une pseudo connaissance ne donnant accès qu'à la réalité sensible, matérielle et changeante du monde. Se fier à l'expérience sensible, c'est être comme des prisonniers enfermés dans une caverne qui prennent les ombres qui défilent sur la paroi faiblement éclairée, pour la réalité même. « Que nul n'entre ici s'il n'est géomètre », fait-il graver au fronton de son école : l'exercice des mathématiques nous apprend à nous détacher de nos sens et à exercer notre seule raison, préalable nécessaire à la dialectique philosophique. La connaissance du réel est connaissance des Idées ou essences, réalités intelligibles et immuables, et cette connaissance est rationnelle. Il y a en ce sens un rationalisme platonicien.
Aristote, au contraire, appuie sa philosophie sur l'observation concrète de la nature (physis), et pose les bases
de la logique formelle, dans son Organon (nous l'appellerions aujourd'hui logique générale), de ce que l'on appela par la suite la métaphysique (au-delà de la physis, c'est-à-dire au-delà de la nature), de l'éthique (éthique à Nicomaque).
Mais ce n'est pas l'usage de la raison, ni sa revendication, qui suffit à définir le rationalisme comme doctrine. Celle-ci se constitue et se systématise à la fin de la Renaissance, dans les conditions spécifiques de la redécouverte de l'héritage antique, et de la mathématisation de la physique.
Le rationalisme moderne repose sur le postulat métaphysique selon lequel les principes qui sous-tendent la réalité sont identiques aux lois de la raison elle-même. Ainsi en est-il du principe de raison déterminante (ou de raison