Le roman et le genre narratif
Avant d’évoquer le cas particulier du roman – le mot, et même la chose apparaîtront assez tardivement – il convient de parler de la forme littéraire à laquelle il appartient, la narration. Aristote, dans La Poétique, oppose à une mimésis dans laquelle les personnages sont représentés directement (le dramatique) une autre forme d’imitation où l’action est racontée par un narrateur (le narratif). Dans les deux cas une différence de degré est introduite par le mode, les niveaux supérieur ou inférieur, et une différence d’énonciation, la narration pouvant être faite à la troisième ou à la première personne.
Rappelons que dans son traité Aristote prend seulement en considération les œuvres en vers et, parmi elles, uniquement celles qui représentent des actions humaines ou des êtres humains. Ce qui nous place assez loin des formes narratives modernes mais nous permet néanmoins de dégager quelques premiers principes directeurs concernant le genre du récit. Celui-ci se reconnaît à : * Une représentation décalée, médiatisée – et non directe comme au théâtre (la parole est rapportée) ; * La présence implicite d’une voix, celle du narrateur ; * Une énonciation variable suivant que le poète parle en son nom propre ou se confond avec la parole d’un personnage.
N’est pas mentionnée ici une particularité qui se rencontre dans un passage de La République de Platon (393d-394c) et qui signale une divergence entre les deux théoriciens antiques. Pour Platon, il y a lieu de distinguer le narratif pur (récits d’où sont absents les dialogues) représenté par le dithyrambe, et le narratif mixte (où récites et dialogues alternent) telle l’épopée. Voici le texte :
« La poésie et la fiction comportent une espèce complètement imitative, c’est-à-dire, comme tu l’as dit, la tragédie et la comédie ; puis une deuxième qui consiste dans le récit du poète lui-même ; tu la